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Forough Farrokhzad La nuit lumineuse : Ecrits...
Forough Farrokhzad
La Nuit lumineuse
Écrits : lettres, récits, nouvelles,
articles, scénario…
Traduit du persan par
Jalal Alavinia
en collaboration avec Thérèse Marini
Lettres Persanes
Introduction
Incarnation des femmes mythiques de la littérature millénaire de l’Iran telles Roudâbeh, Tahmineh, Gordâfarid, héroïnes du Shâhnâmeh de Ferdowsi, Weis, héroïne du roman de Gorgâni, Chirine, Leili, et les sept princesses de Nezâmi ainsi que Shahrzâde des Milles et une nuits, héritière des personnalités historiques comme Râb’eh, Mahasti, Tâhereh, Jaleh et Parvine, des poétesses qui ont plus ou moins partagé un destin commun, Forough Farrokhzad (1934-1967) est une figure majeure de la poésie moderne persane et l’une des inspiratrices du mouvement d’émancipation des femmes iraniennes. Sa poésie, déjà publiée par nos soins, ses écrits publiés ici pour la première fois en français, et sa vie se trouvent toujours, quarante quatre ans après sa mort tragique, au cœur de tous les débats concernant la question de la femme.
Dès son adolescence, elle a cherché, par son esprit libre et rebelle, par l’indépendance de sa personnalité, par sa sensibilité extraordinaire, par sa conviction du pouvoir de l’amour et de l’art, à conquérir toujours de nouveaux espaces de liberté, à aller vers de nouveaux territoires de créativité et à avancer sur les chemins de l’accomplissement de ses potentialités intellectuelles, affectives et humaines.
Par le hasard des circonstances ou peut-être par la force de son caractère, sa volonté et son intelligence, elle a vécu, accompagné et anticipé, probablement involontairement et inconsciemment, dans un cheminement précoce ou dans un processus d’évolution accélérée, toutes les étapes du mouvement de libération de la femme qui ont marqué l’histoire de l’Occident, telles que nous les avons connues depuis les années soixante.
S’engageant dans un combat acharné contre ses parents pour leur imposer son choix du futur partenaire de sa vie, choix d’un mariage d’amour, à l’âge de seize ans, elle croyait pouvoir avoir le champ libre pour se consacrer à la passion de sa vie, la poésie, et en même temps la concilier avec une vie conjugale paisible et constructive. Hélas, elle ne découvre que les affres des tâches domestiques, des obligations conjugales et des devoirs maternels, aggravées par les préjugés de son mari à l’égard de la femme, son conservatisme, ses contraintes et ses restrictions concernant les activités sociales de sa jeune mariée qui allait vite gagner célébrité et réussite et devenir la plus grande poétesse de l’Iran contemporain.
Sa poésie, contrairement à celle des poètes anciens, n’est pas le récit, selon Christian Jambet, « d’une âme qui s’évade de la prison du corps, mais d’un corps vivant de l’esprit de la poésie s’évadant de la prison de l’âme, de la prison spirituelle faite des valeurs du mariage et de la paix respectable qu’elles proposent ». Elle voudrait réhabiliter son corps à travers la réalisation de sa sexualité pour pouvoir ensuite reconstruire sa personnalité, son identité féminine, sur les bases de l’égalité, de la liberté, de l’autonomie, de l’activité professionnelle, de la jouissance des plaisirs de la vie, de l’amour charnel et enfin de l’épanouissement personnel.
Sa poésie ressemble à un volcan de sentiments et de ressentiments, de blessures et d’aspirations, dont les laves continuent toujours de couler sur les générations successives de la jeunesse iranienne. Cette poésie va sans doute rencontrer des résistances et des oppositions de la part de son entourage, des religieux, des traditionalistes et des intellectuels « engagés ».
Tiraillée entre son amour pour Parviz Chapour - qui lui demande de renoncer à la poésie et de se contenter
de la vie d’une simple femme au foyer, de s’occuper de son fils, Kâmi, de devenir une femme comme toutes les autres femmes - et son amour de la poésie, elle opte pour cette dernière. Elle est obligée de se séparer de Parviz et par conséquent de son fils, car le droit de garde est accordé au père. Elle doit maintenant mener une vie de jeune femme divorcée, ce qui aggrave son cas aux yeux de ses parents, des puritains et des milieux traditionalistes. Forough qui avait été qualifiée de mauvaise fille et même de prostituée par son père est maintenant accusée d’être une ‘mauvaise mère’ et ‘une mauvaise femme’. Toute sa vie, elle doit prouver qu’elle a été ‘pure et propre’, qu‘elle n’a pas commis de faute ni de péché.
Fragilisée par la pression de la famille, de ses détracteurs, des controverses médiatiques, des rumeurs et des calomnies, face à l’effondrement des projets de sa vie, à la perte de son aimé et de son enfant, elle fait une dépression qui l’affecte profondément et durablement. Elle en subira les conséquences toute sa vie : les sentiments d’angoisse, de solitude, d’aliénation, de peur, d’isolement, ainsi que les idées noires et les tentatives de suicide, qui prennent fin avec un accident de voiture mortel à l’âge de 32 ans.
Après avoir publié un premier recueil, La captive, Forough quitte l’Iran pour l’Europe dès la fin de sa première hospitalisation. Elle visite l’Italie et l’Allemagne, étudie, apprend des langues, travaille et peu à peu récupère ses forces et retrouve son moral. Elle retourne en Iran après un an, publie le récit de son voyage, un deuxième recueil, Le mur, et écrit des nouvelles et des feuilletons dans les hebdomadaires pour gagner sa vie. Elle participe aussi après son divorce à des activités théâtrales. Elle continue à mener la vie d’une femme seule, pauvre et souffrante, physiquement et psychologiquement, mais en même temps elle résiste aux pressions, se bât pour défendre son honneur et son intégrité et vaincre ses démons en lisant et en écrivant. Elle publie le troisième volet d’une trilogie, un troisième recueil de poésie, La Rébellion, qui marque la fin d’un récit émouvant de la vie d’une femme en captivité familiale et conjugale, se trouvant le dos au mur des contraintes et des conventions sociales et enfin de ses révoltes pour s’émanciper.
A l’âge de 24 ans, Forough se fait recruter d’abord en qualité de secrétaire, ensuite très rapidement comme monteuse et réalisatrice de films documentaires au sein du Studio Golestan Film. Elle refait sa vie entièrement, dans tous les sens du terme, professionnellement, intellectuellement, poétiquement et amoureusement, probablement sous l’influence et en compagnie de son ami, Ebrahim Golestan, écrivain, cinéaste et producteur de films. Elle réalise un documentaire sur la léproserie de Tabriz , La Maison est noire, qui gagne l’admiration des cinéphiles dans le monde entier et qui sera considéré comme l’un des chefs-d'œuvre du cinéma iranien. En même temps elle crée son propre courant poétique dans le cadre de la nouvelle poésie persane en écrivant deux autres recueils, Une Autre naissance, et Croyons à l’approche de la saison froide (publié à titre posthume) l’établissant comme l’un des piliers incontournables de la poésie moderne iranienne.
Elle n’hésite pas à poursuivre sa vie de femme divorcée, privée de son enfant, bien qu’elle n’ait jamais refusé son amour et son attention aux autres, partageant amitié et affection avec un homme marié, et provoquant forcément les foudres des gens malveillants… Elle était un rayon de lumière qui venait de s’émanciper des ténèbres mais qui fut vite éteint par un destin impitoyable… J. Alavinia
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